Leçon 334 - Advaïta (non-dualité), libre arbitre et karma
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De: Yogani
Date: 25 mai 2009

Aux nouveaux membres: il vous est recommandé de commencer les leçons au début, les leçons précédentes étant nécessaires à la compréhension de celle-ci. La première leçon s'intitule « le but de ces leçons » et porte le numéro 10.

Q 1: L'autre jour, cette question m'est venue au milieu de ma séance d'asanas. J'essaye vraiment de ne pas m'accrocher à des réponses mais je reviens sur cette question, car je pense qu'elle peut contenir la clé d'une ouverture...

"Qui choisit?"

Il m'est facile de répondre spontanément: "c'est la conscience silencieuse qui choisit"... mais est-ce le cas? Peut-être quand je ne m'identifie pas à "mon moi" ou à "mon égo" et que je demeure dans cette conscience intérieure silencieuse... mais dans mon cas ce n'est certainement pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Aussi, dans ces moments où je n'ai pas l'impression d'être un témoin silencieux, je suppose que c'est mon "égo" qui prend les décisions. Est-ce correct? Eh bien, là encore je ne suis sûr de rien... pour moi cela pose le problème du libre arbitre. Existe-t-il ou non? Jusqu'à quel point?

Mon opinion (je parle d'opinion mais en fait c'est une certitude qui ne peut être prouvée) est que Dieu contrôle toutes choses. Il y a un plan directeur pour l'humanité et nous accomplissons notre destinée au moment même où nous parlons. Mais nous avons tous l'opportunité et la capacité de prendre des décisions et de contrôler la direction de nos vies. Je réalise que cela indique probablement que le temps n'est pas linéaire ou en fait n'existe pas et que Dieu connaît chacune des actions que nous allons faire avant même que nous ne les fassions. Est-ce vraiment du libre arbitre? Bien sûr, nous pouvons faire ce que nous voulons, mais ce que nous voulons et ce que nous voudrons est déjà connu de Dieu ce qui fait qu'en réalité il n'y a aucune décision à prendre puisque vous les avez déjà faites (comme Dieu). Cela veut-il dire de se relaxer et de laisser la vie couler au-dessus de nous? Est-il vain d'essayer de se créer une destinée de notre choix? Le plan de Dieu remplacera-t-il ceux que nous aurons choisis? Avons-nous réellement le choix? Le choix est-il déjà fait pour nous? Avons-nous vraiment un contrôle sur nos vies ou nous imaginons nous en avoir un? Cela a-t-il un sens de prendre des décisions quand nous ne sommes pas dans l'état du témoin silencieux? Ces décisions servent-elles uniquement de barrières pour Dieu? Désolé de cette avalanche de questions... je serai heureux d'avoir vos commentaires.

R 1: Choisir est entièrement relatif, dépendant de notre état de conscience et de notre point de vue.

Si notre vie n'est pas établie dans la tranquillité (état non relationnel), nous faisons nos choix et vivons avec leurs conséquences (le karma). Les choix sont les nôtres, car nous nous voyons comme des êtres matériels. Notre réalité est définie par notre état de conscience et non par une force extérieure, Dieu compris.

Si nous vivons toujours davantage dans la tranquillité (état relationnel), nous faisons nos choix comme avant, sauf que maintenant ils font peu à peu partie du courant divin et deviennent la tranquillité en action. Le karma est toujours là s'accordant au flot divin qui passe à travers nous.

Si nous sommes de purs adeptes de l'advaïta vedanta, ayant pleinement réalisé la non dualité de la vie, les choix se font en-dehors du champ de notre Soi. Dans une telle situation, l'action, le karma, Dieu même, sont perçus comme extérieurs à ce que nous sommes. L'advaïtin voit toute cette manifestation comme un venin, une illusion jouant sur le Soi non manifesté qui se tient derrière tout cela, même au moment où il s'y engage pleinement et avec compassion. C'est un paradoxe. Alors, le choix n'est plus une part essentielle de la vie. L'advaïtin n'est plus concerné. La vie suit son cours, les choix continuent à se faire mais ils sont transcendés car il/elle les a transcendés.

Ce n'est donc pas que le choix doive rester à jamais hors de notre portée. C'est nous qui en définitive avons laissé derrière nous le terrain de jeu du choix!

Nous ne pouvons pas prétendre jouer à ce jeu à partir d'un état de conscience qui n'est pas encore le nôtre. En d'autres mots, cela ne sert à rien de prendre le point de vue d'un advaïtin si nous fonctionnons en dehors de l'état de tranquillité ou si nous nous engageons de façon relationnelle en nous imaginant être la tranquillité grandissante en action. Nous ferions mieux d'être honnêtes quant à savoir où nous en sommes et d'agir à partir de là. Aussitôt que nous nous projetons mentalement hors de notre réalité présente, nous ne sommes nulle part (nous sommes hors de l'instant présent) et c'est là où les difficultés commencent.

Il vaut donc bien mieux vivre pleinement la vie qui est devant nous, tout en nous engageant dans les pratiques pour aller fermement vers des états de conscience plus élevés. Le long du chemin, nous ferons des choix, même si nous choisissons de nous abandonner de notre plein gré au courant divin qui passe à travers nous, pour choisir en définitive la non-dualité où nous voyons les choix se produire indépendamment de notre nature essentielle qui est éternelle tranquillité.

Quand l'état de l'advaïta (non duel) s'établit dans notre vie de façon permanente, nous voyons que tout arrive automatiquement et que nous sommes la conscience éternelle (le vide) derrière tout cela. Mais on ne peut pas l'imaginer. Ceux qui essayent de le vivre dans le mental seront dans un état déconnecté pire que celui d'une personne "non illuminée" qui fait un effort sincère pour progresser par tous les moyens à sa disposition.

Je vous suggère donc d'être présent là où vous en êtes, de faire les choix les meilleurs pour progresser et surtout d'apprécier le voyage!

Q 2: Si je comprends bien ce que vous dites, vous confirmez que j'étais correct en disant que "celui qui décide" est différent en fonction de l'état du mental (suivant qu'il demeure dans le témoin ou voit à travers l'égo)? L'un étant relationnel et l'autre non relationnel? Quand nous demeurons dans le témoin, les décisions sont vues pour ce qu'elles sont, le courant naturel de l'existence et quand nous voyons la vie à travers l'égo nous nous imaginons avoir le contrôle ce qui en fait n'est qu'une pure illusion?

En conséquence, un "pur advaïtin" peut-il prendre une décision qui va créer un karma négatif (même si nous savons tous qu'ils ne le feront probablement pas)?

R 2: Quand la conscience identifiée (l'égo) se manifeste elle n'est pas une illusion. C'est un état de la conscience. Cet état est tout aussi réel que ce que nous percevons à ce moment. Si c'est là où nous en sommes à un moment donné, je ne pense pas qu'il soit sage de le qualifier d' "illusion". Nous ne pouvons jouer le jeu qu'à partir de là où nous en sommes. Si nous le nions, il ne reste plus rien sur quoi travailler et nous courrons le risque de nous engluer dans ce piège mental.

En fin de compte, c'est bien une illusion, mais quel avantage à le ressasser? Sans la présence du témoin, cela conduira à une paralysie mentale car rien ne peut être résolu par le mental. Cela ne peut être résolu que par la tranquillité. Une enquête sur le Soi efficace danse tout au long de cette frontière.

Un advaïtin réalisé peut-il créer un karma négatif? Il/Elle ne fera aucune différence entre positif et négatif et ne prétendra pas créer quoi que ce soit. Son point de vue est que l'univers tout entier fonctionne tout seul sans lui/elle. Ce point de vue est totalement incompréhensible pour tout le monde sauf pour un autre advaïtin réalisé. Il faut être Un pour connaître le Un.

Heureusement, yama et nyama (les contrôles et les observances) fonctionnent dans la grande illusion de l'univers, selon le degré de présence du témoin, ce qui bien sûr inclut les advaïtins réalisés.

Q 3: Oui, cela fait sens. Toutefois, je ne voulais pas dire que l'"égo" est une "illusion". Ce que je voulais demander n'est pas "l'égo est-il une illusion", mais bien "le contrôle" est-il une illusion. Avons-nous en fait un contrôle sur quoi que ce soit? Même si nous ne sommes pas de "purs advaïtins" comme vous les appelez et prenons des décisions à partir de notre "conscience identifiée", les décisions que nous prenons ne nous donnent-elles pas l'illusion du contrôle, peu importe comment nous les "voyons"? En fait, n'avons-nous pas tout simplement l'illusion de croire que nous prenons une décision (que nous le sachions ou non)? Une décision peut-elle être "bonne" ou "mauvaise"? Et, si ce n'est pas le cas, n'est-ce pas l'idée de prendre une décision qui serait elle-même une illusion? Rien n'aurait d'importance.

Etre conscient de l'illusion permet-il de "voir à travers" elle? Selon la perspective ci-dessus, seules nos pratiques pourraient nous permettre de dissiper l'illusion. Je ne suis pas sûr d'être d'accord. Je ne suggère pas de "ressasser" quoi que ce soit, mais je propose simplement d'enquêter sur la réalité de choses souvent perçues comme "réelles".

Je suis désolé, mais de nouveau mes mots ne transmettent pas ce que j'essaie de demander. Je ne demandais pas "un advaïtin réalisé peut-il créer un karma négatif", je voulais dire "la décision d'un advaïtin réalisé peut-elle avoir pour résultat un karma négatif?". Ou bien, voulez-vous dire qu'aucun résultat ne peut être négatif?

R 3: Si une enquête sur "l'illusion" facilite une expansion de la conscience (davantage de paix et de bonheur dans la vie), alors elle prend appui sur la tranquillité (elle est relationnelle). Si elle consiste seulement en une proclamation mentale que la vie est illusion, elle ne s'appuiera pas sur la tranquillité (elle sera non relationnelle) et conduira à une vie misérable. C'est la frontière et nous devons la découvrir par nous-mêmes.

Un advaïtin réalisé ne considère pas le karma comme positif ou négatif. Il ne s'y intéresse même pas du tout. Toutes les actions, tous les choix sont vus comme un jeu spontané dans le champ de la conscience, pareil à un rêve. Si vous appliquez toutes ces questions à l'état de rêve, c'est une très bonne analogie avec le point de vue de l'advaïtin sur la vie. En supposant que l'advaïtin ne fasse pas partie de ces personnes qui sont obsédées par leurs rêves, ce qui serait une contradiction!

D'un autre côté, on peut estimer que des actions d'un advaïtin peuvent avoir un effet karmique "négatif". Comme de pousser des débutants dans une enquête sur le Soi prématurée (non relationnelle) conduisant à pas mal de souffrances. Autant dire, un coup d'épée dans l'eau... Mais les advaïtins ne s'occupent pas des conséquences de leurs actions. Ils agissent instinctivement. La présence naturelle de yama et de nyama chez ceux qui ont atteint l'illumination guide leurs actions et ils n'ont même pas besoin d'y penser. Ils ne discriminent plus comme le reste d'entre nous. C'est une vie sans attachement, une vie d'amour divin surabondant. Bien sûr, nous ne pouvons pas savoir où en est exactement un advaïtin. Ils peuvent "chuter" de temps à autre, en fonction de la solidité de la fondation de silence intérieur sur laquelle ils s'appuient. C'est le problème d'une illumination bâtie sur une compréhension intellectuelle qui doit être constamment entretenue, par rapport à une illumination imprégnée de silence intérieur (le témoin). Dans ce dernier cas, il s'agit d'un advaïtin bien plus digne de confiance que dans le premier. Le premier doit se maintenir, le second se contente d'être. La question est donc: à quel advaïtin pouvons-nous faire confiance? Nous ne pouvons pas en être certain. La bonne nouvelle est que le gourou qui est en vous, lui il sait...

Ainsi, le contrôle est-il une illusion? Seulement dans la mesure où cette vie est une illusion. Bien sûr, dans un sens absolu elle est une illusion. Ainsi, dans l'absolu, le contrôle est une illusion, comme le sont, le choix, le libre arbitre et tout ce qui arrive dans le champ de l'individu ou de la personnalité, karma compris. Dans cette perspective même la personnalité est une illusion. C'est la vue des absolutistes et si elle n'est pas appréhendée à partir de la perspective du témoin, elle sera la plus grande de toutes les illusions. Cela revient à une tentative de l'égo de mettre l'advaïta dans sa poche. Cela ne marche pas. Les seules affirmations de cette nature qui soient valables sont celles que nous pouvons laisser aller dans la tranquillité. C'est l'effet du samyama, l'acte qui consiste à laisser aller dans la tranquillité une intention ou une question. L'égo ne peut pas mettre dans sa poche le samyama véritable et la non-dualité véritable.

Une fois trouvée notre "frontière" entre là où le témoin est présent (relationnel) et là où nous cessons d'être honnêtes en projetant notre enquête dans un réseau de pensées sans aucun rapport avec la tranquillité, nous pouvons aborder la recherche du Soi de bien des façons.

Vous avez mentionné dans votre première question que l'interrogation "qui choisit?" était peut-être pour vous la clé d'une ouverture. Je vous ai donné une réponse très longue mais ce n'est pas vraiment de cette réponse que vous avez besoin pour une ouverture. Ce ne sont que mes mots.

Si vous vous posez la question et si vous lui donnez toute l'attention que votre désir spirituel (votre bhakti) peut générer pour ensuite la laisser aller, une découverte plus profonde peut alors émerger. L'essence de l'enquête est de nous poser nos questions les plus brûlantes par des moyens susceptibles de nous ramener à la maison, la maison de la vérité. Dans ce cas il peut être utile de se demander "Qui choisit?", de laisser aller la question et de continuer à enquêter. Quelle est la vérité dans tout cela? Est-ce le karma qui choisit? Notre mental pensant? La volonté de Dieu? Suivant la réponse que nous supposons, nous pouvons demander "qu'est-ce que le karma?", "le mental?", "la volonté de Dieu?" etc... Si nous continuons avec intensité et honnêteté, laissant aller dans la tranquillité nous arriverons inévitablement au même endroit, à la réalisation directe: "je suis le choix", "je suis le karma", "je suis le mental", "je suis le libre arbitre" et oui "je suis la volonté de Dieu".

Si on en arrive là par une enquête relationnelle sur le Soi, ce ne sont plus des affirmations. Ce ne sont plus des conclusions du mental. Cela dépasse les affirmations et les conclusions, dépasse le mental, y compris la conception humaine de la volonté de Dieu. Ce sont, au contraire, des réalisations directes de notre état d'Etre. C'est notre conscience, présente en tant que témoin qui forme le constituant essentiel de toutes ces choses. C'est "Cela" qui est derrière toutes les perceptions. Ainsi vous pouvez demander en quoi consiste l'amour, la vérité, un abandon actif, une carrière valable, cela s'applique à tout ce que vous pouvez vivre avec votre bhakti et laisser aller dans la tranquillité. Pas à pas, vous pouvez ramener chaque enquête à votre conscience inconditionnelle. Vous découvrirez ainsi être l'essence de toutes choses.

Ne prenez pas ce que je vous dis pour argent comptant. Trouvez par vous-même. C'est la seule façon pour que vous trouviez la vérité. Elle est aussi proche que la conscience que vous expérimentez maintenant.

C'est tout à fait différent que de dire: "je suis mon corps", "je suis cette personnalité", etc., à partir du mental. C'est un virage à 180°. Quand nous disons: "je suis le corps" et "je suis cette personnalité" ce que nous disons en fait c'est: "ce corps est à moi" et "cette personnalité est mienne", ce qui bien sûr est une pure imagination. Par une enquête relationnelle sur le Soi déterminée et sincère, nous arrivons au contraire à la conclusion: "ce corps est une manifestation de ce que je suis" et "cette personnalité est une manifestation de ce que je suis". Ayant atteint ce niveau de déduction grâce à l'enquête, il ne s'agit plus de la pensée de cela mais bien de la perception directe de cela. La pensée de cela est un retour dans la dualité, quoiqu'avec le temps nous devenons capables de rester dans l'expérience non duelle tout en ayant en même temps la pensée. C'est la différence entre la pensée et la perception directe.

Avec la perception directe, vient une sensation d'expansion unique vers la connaissance directe de la pure conscience du Soi comprise comme étant également les objets de notre perception, les objets de notre enquête. C'est aussi la découverte que les objets de notre perception font partie de la pure conscience du Soi, qui dissout la dualité entre le témoin et le reste de notre monde. Le témoin et le monde se dissolvent l'un dans l'autre pour devenir unité, pour devenir l'expérience directe de la non-dualité. Par notre questionnement, nous nous éveillons à ce que nous sommes en découvrant ce qui n'est pas notre Soi véritable.

Avec le temps, ce processus de dissolution grâce aux enquêtes directes qui nous intéressent le plus (chargées avec notre bhakti) conduira à l'union permanente qui au lieu de demeurer dans le silence intérieur à contempler le monde, permettra à notre silence intérieur de devenir le monde dans notre vie quotidienne. C'est personnel et impersonnel en même temps et recoupe tout ce que nous avons vu dans ces leçons en particulier sur la façon de cultiver et d'extérioriser le silence intérieur et sur l'affinement de notre perception qui vient avec la montée de la conductivité extatique et notre désir continu (la bhakti) de vivre dans la liberté absolue résultant de la jonction de ces aspects de notre nature dans l'unité.

Nous serons sage d'honorer le point où nous en sommes maintenant et de travailler à partir de là afin de ne pas gaspiller notre temps en restant coincé à tourner en rond en pensant à l'advaïta (la non-dualité) et de prendre les mesures nécessaires pour aller de l'avant. Tels sont les choix que nous pouvons faire à travers notre aspiration sincère (bhakti) à la libération, permettant à tout le karma de s'élever jusqu'au débordement divin. C'est pourquoi nous faisons nos deux pratiques journalières et nous nous engageons dans la recherche du Soi quand nous savons que, grâce au témoin, nous devenons capables de fonctionner de façon relationnelle. Comme nous l'avons toujours dit, il faut avancer pas à pas en pratiquant quand c'est nécessaire un "self pacing" prudent tout au long du chemin.

Le gourou est en vous

AYP Plus


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